( Il y a Jojo, Crnch et Yo. On les appelle les Echte Kastars, ils
racontent des blagues avec un accent très fort qui me fait rire
en-dedans comme un grand courant d'air. Je leur dessine des choses
qu'ils iront tatouer sur leurs corps. J'aime leurs éclats de rire et de
voix, l'odeur chez eux, les pyramides de canettes et les cendriers qui
dégueulent. On ne refait jamais le monde, on joue à pierre papier ciseau
ou au bras de fer. Je perds toujours. Il y a S, qui m'apprend des
nouveaux mots que je note sur des bouts de papier qui trainent, factures
et tickets de métro, je les accroche au mur, nécrophage, niquedouille,
mansuétude, salmigondis. On écoute l'opéra de Norma et les Variations
Goldberg, il rassure comme un père. Il y a l'autre S, on regarde le cul
des filles, on marchande ce qu'on a et ce qu'on a pas, on se confie nos
envies de solitude. Il y a L, on se partage nos histoires d'absence
d'amour en murmurant. Il a une voix grave et la gentillesse gravée au
fond des yeux, profonds de nombreux voyages. Il y a P et F, les grands
qui font semblant d'être sérieux, ils font des grimaces quand personne
ne regarde. Il y a M et C, douces et fortes, on se raconte nos failles,
toujours la tête droite. Elles sont fluettes, mais solides. Il y a la
vieille Clark, mais sa mémoire est sans faille, impressionnante de
précision, il dit c'est merveilleux à tout bout de champs et adore
parler de sexe au petit-déjeuner. Tous, on partage le travail, les
poèmes sur les pets, la musique, les répliques de Dikkenek et le sommeil
qui n'arrive que lorsque le soleil avale le ciel. Nous n'avons rien et
tout en commun. Je me sens un peu chez moi. ) |
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